Usurpation d'identité en ligne : MAM ressort une proposition de loi que j'avais rédigée…

[arf] Je viens d’apprendre ça en lisant ceci :

L’usurpation d’identité est devenue un vrai problème qui peut facilement faire des dégâts dans la vie privée des victimes. Pour y remédier, une proposition de loi a été faite pour inscrire ce délit dans le Code Pénal. […]
C’est une proposition de loi faite en 2005 par l’ancien sénateur Michel Dreyfus-Schmidt que Michèle Alliot-Marie va inclure dans sa Lopsi (Loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure). Elle la défendra très bientôt devant le parlement. [source : infos-du-net.com]

Cette proposition de loi visant à créer un délit d’usurpation d’identité numérique, je l’avais soumise au défunt sénateur pour lequel je bossais. Jamais je n’aurais imaginé que MAM serait celle qui la ressortirait (mais que fait le PS dont mon sénateur était [et dont je ne suis pas] ??). Je crains que MAM ne fasse une mauvaise pub à un texte qui pourtant est une garantie pour les libertés.

Je vous invite à relire ce billet rédigé en 2006 qui explique mon raisonnement.
Je disais notamment ceci :

Si on veut sécuriser l’identité numérique des citoyens, plutôt que de charger en biométrie, en videosurveillance ou tout autre contrôle a priori (par nature liberticide), pourquoi ne pas présenter une simple réponse de droit ? Je préfère de loin qu’on fasse confiance aux citoyens en édictant des interdits qu’on peut ou ne pas suivre, quitte à en payer le prix après (c’est ça aussi la démocratie), plutôt que de vivre dans une société ultrasécurisée.

Anonymiser le politique

En fouillant mes archives, je suis tombé sur vieux texte que j’avais écrit en 2002 après le choc du 21 avril. J’ai trouvé amusant d’en ressortir un extrait à quelques semaines du Congrès du PS.
J’y faisais un rêve : et si les motions (et les textes de lois !) étaient anonymes ? Il se passerait quoi ?

D’abord, le constat. Tous les partis sont traversés de courants, d’écuries, de clubs. Bref d’enjeux de personnes. De fait, on ne se positionne plus que par rapport à une signature. Qui a écrit cet amendement ? Qui a rédigé cette motion ? Qui est a l’origine de cette proposition ? Nous sommes tous alors réduits, non pas à lire le texte, mais à chercher à savoir ce que le vote de telle ou telle proposition impliquera dans les équilibres de courants (et les répartitions de postes). Cette atmosphère est à l’origine du discrédit politique. Pas la peine d’en faire des tonnes. Ce qui exaspère l’électorat et les citoyens comme moi c’est justement cette personnalisation à outrance des enjeux politiques.

J’arrête le blabla et j’en viens à ma proposition qui se veut un idéal. Pourquoi ne pas rendre les propositions, textes motions et amendements, anonymes ? Qu’on ne sache pas qui les a signé ! On serait soudainement contraint de lire les textes ! De se positionner sur le fond tout simplement parce qu’on aurait pas d’autre choix.

C’est beau de rêver.

L'usurpation d'identité numérique nécessite une loi ?

WIP by EmyLorsque je lis les détails de cette affaire (une femme usurpant d’identité d’une collègue sur meetic), je me dis que la proposition de loi sur laquelle j’avais bossée l’an dernier est plus nécessaire que jamais.

D’abord et aussi étrange que cela puisse paraître, notre code pénal ne condamne pas l’usurpation d’identité sur le net en tant que telle (lire l’exposé des motifs de la proposition de loi). Le juge est donc contraint de recourir à des artifices détournés pour condamner l’e-usurpateur (ce qui n’est pas sain dans un État de droit). Ce fut le cas dans la récente affaire Meetic où l’e-usurpateur fut sanctionné pour « violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours » et pas directement pour l’usurpation numérique dont il était à l’origine.

On se rappelle peut-être qu’il a fallu attendre des années pour que le viol soit qualifié comme tel devant les tribunaux (on en restait à l’agression physique). Eh bien c’est la même chose avec l’e-usurpation, on en reste à l’atteinte pécuniaire, aux chocs émotionnels induits ou à « l’intrusion dans un système de données ». La proposition de loi sur l’usurpation d’identité numérique offre ici une autre voix, plus juste à mon avis.

Enfin, le texte présente un principe de fond : Si on veut sécuriser l’identité numérique des citoyens, plutôt que de charger en biométrie, en videosurveillance ou tout autre contrôle a priori (par nature liberticide), pourquoi ne pas présenter une simple réponse de droit ? Je préfère de loin qu’on fasse confiance aux citoyens en édictant des interdits qu’on peut ou ne pas suivre, quitte à en payer le prix après (c’est ça aussi la démocratie), plutôt que de vivre dans une société ultrasécurisée.

Je remercie donc Marc Rees de PC inpact d’avoir « ressorti » cette proposition de loi. Une façon de rappeler que le texte, comme toute proposition de loi émanant de l’opposition, n’a pas encore eu le privilège de figurer dans l’agenda gouvernemental. Et on se demande bien pourquoi…