"Notre gestapo de l'Algérie française "

« Notre gestapo de l’Algérie française « 
Date de Création: 20 Oct, 1997, 12:50 PM

À l’heure où l’on juge Maurice Papon pour ses crimes contre l’humanité durant la seconde guerre mondiale, à l’heure où l’on espère voir se lever le drap de l’oubli sur ce que furent les responsabilités de notre nation (et pas seulement de l’État français) durant les heures sombres, à l’heure où l’Église de France fait son timide mea culpa pour ses positions entre 39 et 45, il est nécessaire en ce 36 ème anniversaire du massacre des algériens du 17 octobre 61 de questionner notre pays sur un autre de ses trous noirs historiques qu’était la Guerre d’Algérie. On se rappelle peut-être de la célèbre affaire Audin, ce professeur de mathématiques à l’université d’Alger qui, accusé d’affinité avec le FLN, fut arrêté et torturé par les autorités françaises. Cette affaire mit en lumière la responsabilité directe de trois ministres du gouvernement Guy Mollet en 56-57. Dénoncées par le FLN et par des intellectuels français comme un système répressif dignes des méthodes nazis, ces pratiques furent niées par le gouvernement Mollet. Elles furent pourtant reconnues dès cette époque, par des acteurs et des témoins de la barbarie, et finalement justifiées par le général Massu en personne en 1971 comme « un moindre mal ».
Y a-t-il eu une gestapo française durant la guerre d’Algérie ? Le 13 janvier 1955 dans un article titré « Votre gestapo d’Algérie », Claude Bourdet, appuyé en cela par François Mauriac, s’en prend violemment aux tortures pratiquées ça et là par les autorités françaises instituées. Depuis le début des agitations fellaghas, de nombreux témoignages concordant rapportent certaines pratiques telles que le supplice de la baignoire, le gonflage à l’eau par l’anus, le courant électrique sur les muqueuses, les aisselles ou la colonne vertébrale…
Ce triste anniversaire d’octobre 61, où sous la responsabilité de Maurice Papon des centaines d’algériens furent noyés dans la Seine, sera peut-être l’occasion de se rappeler que l’histoire de France n’est pas un monument que l’on doit vénérer, mais un parcours qu’il faut questionner – n’en déplaise à Philippe Séguin -. La France de Vichy n’est pas si loin de la France de la guerre d’Algérie : Maurice Papon symbolise bien cette continuité puisque du statut de secrétaire général de la préfecture de Gironde de 42 à 44, à celui de préfet de police de Paris pendant la guerre d’Algérie, il n’y a qu’un pas franchi allègrement jusqu’au poste de ministre sous Giscard d’Estaing – un long fleuve tranquille, somme toute -. Espérons que la question écrite posée à monsieur Jospin par la député Véronique Carrion-Bastok, il y a quelques jours à peine, sur la reconnaissance de la responsabilité de l’État français durant la crise d’octobre, sera le moment privilégié d’une prise de conscience plus large qui lèvera un jour peut-être le flou véritablement politique qui règne encore sur l’ampleur des exactions des autorités françaises durant toute la guerre d’Algérie.

Tristan Mendès France
et Michael Prazan
Marianne 20/26 octobre 97

Le négationnisme japonais s'affiche dans les publications populaires.

Le Monde 9/97
Yoshinori Kobayashi est un manga-ka, autrement dit, un dessinateur de bandes dessinées japonaises. Son style graphique ne le distingue pas vraiment de ses confrères; les yeux de ses personnages sont aussi grands qu’ailleurs, et les postures, les simagrées, les expressions emphatiques parsemées d’onomatopées humoristiques y font loi, à l’instar des plus célèbres mangas comme Candy ou de Dragon Ball Z. En cela, Kobayashi ne fait que se plier aux figures imposées du mode d’expression qu’il s’est choisi. Pourtant, dans cette gigantesque production du Manga, adaptée aux différentes composantes socioculturelles de la société japonaise (les mangas s’adressent aussi bien aux cadres supérieurs qu’aux lycéennes en uniforme marin), Kobayashi fait figure d’exception. Ses mangas ne sont qu’un alibi, un prétexte lui permettant de délivrer un message politique. Deux fois par mois, dans la revue Sapio, revue d’actualité proche des milieux réactionnaires – mais qui n’en est pas moins populaire, particulièrement auprès de la jeunesse – , Kobayashi remplit plusieurs pages de ses cases dessinées. La célébrité de Kobayashi, amorcée depuis une quinzaine d’année, a connu une véritable renaissance, il y a environ quatre ans, lorsqu’il fut l’un des premiers à discréditer les pouvoirs publics dans une affaire de sang contaminé, puis en révélant les complicités de la secte Aum Shinrikyo. Le procès d’Asahara Shoko, l’inquiétant gourou criminogène de la secte, à l’origine de l’attentat au sarin dans le métro de Tokyo en 1995, est aujourd’hui en cours de jugement. Kobayashi est avant tout un chroniqueur politique, un satiriste qui ne mâche pas ses mots ni ne dissimule ses accointances idéologiques. Voilà deux ans qu’il s’est lancé dans un nouveau combat, en joignant les rangs du jiyushugi shikan, le  » libéralisme historique « , un mouvement de type révisionniste mené par Nobukatsu Fujiyoka, professeur d’histoire à Todai, la plus prestigieuse université du pays. Ce mouvement profite par ailleurs de nombreux appuis au sein du PLD (parti libéral démocrate – au pouvoir presque sans discontinuer depuis l’après-guerre) puisque un frange du parti lui garantit un soutien discret. Rappelons au passage que le gouvernement japonais a dissimulé pendant cinquante ans des preuves attestant des exactions et des massacres commis par l’armée impériale, encouragé souvent en cela par les Etats-Unis. Ce même gouvernement qui a si longtemps masqué l’ampleur des massacres et la responsabilité du Japon en refusant les termes de  » guerre d’agression  » dans les livres scolaires et en oblitérant ou minimisant les pages les plus noires de son histoire contemporaine.
Approchant la quarantaine, Yoshinori Kobayashi est identifiable au premier coup d’oeil. Avec son visage juvénile, ses cheveux plaqués et ses lunettes rondes, Kobayashi (qui autrefois reçut le titre de  » l’homme le mieux habillé du Japon) est familier du grand public grâce à la figurine de ses dessins. Le manga-ka a en effet trouvé le moyen de s’exprimer à la première personne en créant un personnage à son image, un double dessiné qui le suit depuis des années et construit la biographie de ses prises de positions successives. Narrateur partisan et familier, ce personnage qu’il introduit dans chaque page de ses bandes dessinées lui tient lieu de porte-parole. Dans ces mangas les plus récents, il propose sans langue de bois sa version des événements du passé tout en discréditant ses adversaires, animés selon lui d’un  » masochisme  » destructeur et antinational. Les bulles de ses dessins sont le cadre de discours fleuves et enflammés qui, insidieusement, séduisent une nouvelle génération de Japonais éduqués dans un flou historique, et sur qui le manga révisionniste produit l’effet d’un exutoire. Dans Le Manifeste du nouvel  » orgueillisme  » (Shin gomanisumu sengein), Kobayashi écrit:  » dans le désordre de la guerre, l’armée impériale a fait construire des maisons pour protéger les femmes de la violence qui régnait quand le Japon est entré en Chine.  » Et si ces femmes chinoises ou coréennes ont fini par sombrer dans la prostitution, Kobayashi soutient que le Japon n’a rien à y voir:  » Ce ne sont pas les japonais qui ont rassemblé les femmes de réconfort forcées, mais les collaborateurs chinois. Ce sont eux qui en ont fait commerce pour leur propre compte. « . Le personnage Kobayashi, petite figurine en noir et blanc, dans des postures convulsives et hyperboliques, tour à tour moraliste, accusateur ou perplexe, mais toujours en proie à une hystérie graphique et dramatisée par le genre, déjoue, au fil de ce manga (d’abord publié en feuilleton dans Sapio puis édité en version intégrale le 20 mai 1997), les pièges et les contradictions de  » l’histoire officielle « . Se voulant représentatif de la génération des enfants du Baby-boom, Yoshinori Kobayashi retrace dans son Manifeste du nouvel  » orgueillisme  » la trajectoire exemplaire de ses réflexions sur la question des femmes de réconfort et des événements qui l’entoure. Il y raconte qu’après une longue période d’indifférence sur ces lointaines questions concernant  » la guerre d’occupation « , il s’est mis à douter des discours en vogue qui tendent à noircir à dessein les responsabilités du Japon dans cette affaire. Finalement, ayant pesé le pour et le contre des arguments de chacun, il se serait laissé convaincre par des personnalités plus éminentes que lui en la matière.
Mais ne nous y trompons pas, la rhétorique révisionniste de Kobayashi utilise les mêmes détours que ceux énoncés par Roger Garaudy au cours de son récent procès. Se défendant de toute forme de racisme, Kobayashi affirme que son jugement repose sur des faits objectifs et des doutes légitimes, quand ses détracteurs n’ont à lui opposer que des sentiments au mieux généreux, au pire pervertis par des médias qui s’efforcent de propager une haine du Japon. Passant sous silence les quelques 3000 victimes de l’Unité 731 ou les charniers de Nankin, il distille le doute sur la question très précise des  » femmes de réconfort  » (euphémisme jusqu’alors admis par le ministère de l’éducation), et la conclusion de son manga passe nécessairement par son ralliement à  » l’association pour la révision des livres scolaires  » de ses amis Nishio Kanji et Nobukatsu Fujiyoka. Ce ralliement aura pour conséquences sa collaboration à un récent livre révisionniste qui compte plusieurs signatures prestigieuses, mais aussi son éviction de SPA, un autre magazine dans lequel il publiait ses dessins. En novembre dernier, le lobby de Kobayashi réussissait à faire supprimer du grand mémorial de Nagasaki 176 témoignages photos des massacres de Nankin, sous prétexte qu’ils provenaient de films de propagande américaine. Le sac de Nankin
Un an après le pacte anti-comintern signé entre Tôkyô et Berlin, le Japon envahit en 1937 la Chine du Nord. Pékin capitule très vite devant l’armée japonaise, mais le gouvernement chinois, qui siège alors à Nankin, décide de résister. Il envoie l’armée barrer la route aux japonais, mais cela n’empêche pas Shanghaï de tomber à son tour. Arrivée à Nankin, l’armée impériale japonaise se livre à un véritable massacre. Les 200 000 chinois qui se trouvent encore dans la ville (beaucoup ont fui avant l’arrivée des japonais) sont tous exécutés dans d’atroces conditions. Les femmes sont sauvagement violées, des hommes et des enfants sont enterrés vivants ou suppliciés selon des directives précises. La ville est mise à sac puis brûlée de fond en comble. Le Prince Asakasa, premier responsable de ce carnage, ne sera jamais inquiété après la guerre.

L’Affaire des femmes de réconfort
En 1990, le gouvernement niait toujours l’existence de ces jeunes femmes, chinoises ou coréennes, que l’armée Japonaise avait enrôlées pendant la colonisation de la seconde guerre mondiale pour servir de défouloir sexuel à ses soldats. Mais à partir de 1993, les documents incriminant clairement les responsabilités de l’armée furent produits par ce même Ministère de la Santé et des Affaires Sociales qui les niait trois ans plus tôt, ou furent révélés par la presse. Non seulement la mention  » femme de réconfort  » est écrite en toutes lettres sur ces documents d’époque (attestant de fait leur existence), mais on y découvre également la systématisation de la méthode employée à l’époque. Les dernières enquêtes estiment le nombre de ces  » femmes de réconforts  » (dont on admet aujourd’hui qu’elles étaient forcées à la devenir et très souvent brutalisées) dans une fourchette de 150 000 à 200 000 personnes.

L’ Unité 731.
Entre 1936 et 1945, dans un centre de Mandchourie proche de Harbin, un groupe de scientifiques japonais pratiqua des expérimentations biologiques à des fins militaires. L’unité 731, sous la direction du général Shiro Ishii, assassinat plus de 3000 personnes (la plupart étant des civils chinois) afin de doter l’Archipel d’armes bactériologiques. L’unité 731 recruta plusieurs centaines de médecins issus des plus prestigieuses universités qui se livrèrent à toutes sortes d’expérimentations morbides : On inocula ainsi à des cobayes humains – des  » maruta  » chinois, mandchous ou russes blancs – la typhoïde, la dysenterie, la tuberculose et d’autres virus. Entre 1940 et 1942, l’unité 731 mit en pratique ses recherches dans la région de Nankin en propageant des épidémies par les puits et les sources. Après la guerre, les américains offrirent au général Ishii l’impunité historique en échange de ses travaux scientifiques. Ishii poursuivit sa carrière dans la haute administration. Aujourd’hui, de nombreux procès s’ouvrent à Tôkyô. Les familles des victimes chinoises, profitant de la relative entante entre le Japon et la Chine, attaquent l’Etat japonais en lui réclamant des excuses officielles et des dédommagements financiers.

Tristan Mendès France
Michaël Prazan

Les offensives du révisionnisme nippon

Les offensives du révisionnisme nippon
Date de Création: 19 Sep, 1997, 12:49 PM

L’extrême droite japonaise, malgré sa faiblesse électorale, fait beaucoup parler d’elle depuis quelques mois. Elle est à l’origine de certaines tensions qui se sont immiscées dans les relations diplomatiques entre la Chine et le Japon depuis le mois d’août, et concentre désormais son offensive autour d’une nouvelle conception de l’histoire: le Jiyushugi shikan, qu’on pourrait traduire par  » libéralisme historique « . Nobukatsu Fujiyoka, professeur à l’université de Tokyo est l’initiateur de ce révisionnisme nippon qui, accompagné d’un collectif de professeurs d’universités et d’une centaine de députés du PLD (le Parti Libéral Démocrate), use de son prestige afin de remettre en cause la responsabilité du Japon dans les crimes perpétrés par l’armée impériale au cours de la guerre de colonisation. Ishigara, auteur reconnu dans son pays, a récemment publié un livre en collaboration avec Yoshinori Kobayashi. Ce dernier, personnage atypique et inquiétant est un manga-ka (un dessinateur de BD japonaise) qui, par ses talents de satiriste et grâce à la tribune qui lui est offerte deux fois par mois dans la revue Sapio, une revue très populaire auprès de la jeunesse, prétend par exemple que ce qu’on appelle dans les manuels d’histoire les  » femmes de réconfort forcées « , ces jeunes femmes coréennes enrôlées de force dans les bordels de l’armée impériale, étaient soit venues de leur plein gré, soit amenées par des collaborateurs chinois un peu zélés. En bref, le Japon ne serait pour rien dans cette triste histoire qui laisse encore de profondes traces dans les mémoires, et particulièrement en Corée où le Japon n’a jamais présenté d’excuses officielles ou indemnisé les victimes. Mais, nous explique Kobayashi, le Japon n’a aucune raison de faire des excuses à ses voisins puisqu’il n’est pas responsable des crimes qu’on lui reproche encore. Habile et complexe, Yoshinori Kobayashi aime brouiller les cartes. Et s’il ne réfute pas complètement le terme de nationaliste, il se prétend non-raciste et antimilitariste. Le manga, nul ne peut aujourd’hui l’ignorer, est un art populaire qui brasse au Japon une clientèle très large, et les arguments de Kobayashi (étayés dans un manga intitulé  » une nouvelle déclaration d’orgueil « ) pourraient bien trouver quelque écho auprès d’une jeunesse fébrile qui ne veut à aucun prix être tenue pour responsable des crimes perpétrés par ses aînées, crimes restés tabous et frappés par la loi du silence. De son côté, à l’instar de Nobukatsu Fujiyoka, Kobayashi – accompagné d’un autre professeur d’université, Kanji Nishiyama, et d’un cortège d’intellectuels nationalistes – fait partie d’une association qui comptait 1700 adhérants en mars dernier et qui se comporte en véritable lobby dont l’objectif déclaré est le remaniement des manuels scolaires d’histoires traitant de cette période. Pourtant, à lire ces mêmes manuels où les expériences bactériologiques de l’unité 731 sont à peine évoquées, où les crimes contre l’humanité perpétrés en Mandchourie ou en Corée sont paraphrasés par d’obscurs euphémismes, on est loin des polémiques qui, en France, progressent néanmoins vers une plus grande lumière à l’égard des responsabilités du régime de Vichy.

Le 29 août 1997 la cour suprême du Japon a reconnu, pour la première fois, l’illégalité de la censure gouvernementale sur un manuel scolaire relatant les crimes de guerre de l’armée japonaise, entre les années 1937 et 1945. Et c’est le ministère de l’Éducation qui a été condamné par les juges de la cour suprême. L’affaire avait été amenée devant les tribunaux par le professeur d’histoire Saburo Ienaga qui s’oppose aux tentatives révisionnistes de Fujioka ou Kobayashi et à la complaisance dont le PLD, au pouvoir actuellement, fait preuve à leur égard. Cette sanction exemplaire vient à point nommé puisque le premier ministre Ryutaro Hashimoto se rend début septembre en Chine au cours d’une visite officielle. La Chine, qui célèbre cette année le 25e anniversaire de la normalisation des relations diplomatiques entre les deux pays asiatiques.

Tristan Mendès France
Michael Prazan

Libération 19/9/97

Glossaire Courtois de Radio Courtoisie

Glossaire Courtois de Radio Courtoisie
Date de Création: 26 Aug, 1997, 12:45 PM
Glossaire Courtois.
L’événement du Jeudi 26 aout 97

(RC=Radio Courtoisie)
ASSIMILATION : Il serait bon de  » remplacer le ministère de l’intégration par le ministère de l’assimilation  » déclarait il y a peu Jean Ferré dans son émission du lundi. Selon le petit Robert, assimiler, c’est  » rendre semblable “. Or, si  » intégrer “, c’est accepter la différence de l’autre,  » l’assimilation  » passe nécessairement par la négation de toute différence. La dissemblance physique place de fait toute une cathégorie d’étrangers en marge de la Nation.

B’naï B’rith : l’association juive est sur Courtoisie devenue récemment la synthèse de toutes les puissances  » occultes  » qui participent au complot mondialiste:  » Un certain nombre de puissances occultes; la franc maçonnerie, le B’nai B’rith ont pour objectif la destruction des nations (…) et un grand nombre d’hommes politiques – je ne citerai pas de noms – se sont littéralement soumis au diktat du B’naï B’rith.  » déclarait Paul Lambert en mai dernier dans le Libre-Journal des médias.
CIVILISATION : Jean Ferré martèle régulièrement que seules les civilisations française et européenne sont à l’origine des grandes avancées scientifiques et culturelles. Impostures donc, l’invention des chiffres par les arabes, ou l’astronomie des chinois.
DECADENCE : La société légale est en décadence. RC s’y oppose en affirmant l’idée d’une France ancrée dans son identité, conservant farouchement ses valeurs quand partout ailleurs elles sont bafouées, attaquées ou ignorées. L’immigration, le mondialisme qui envahit la culture et la noie dans un vaste magma planétaire sont les principaux agents de cette décadence.
ÉGALITARISME : Par égalitarisme, on dénonce sur RC, tous ceux qui revendiquent l’égalité républicaine. Prôner l’égalité entre les hommes reste une  » utopie marxisante “, alors que souligner l’inégalité des races n’est qu’un constat rationnel,  » désidéologisé “.
FRANCOPHONIE : RC est la radio du pays réel et de la francophonie. Le terme francophonie est compris par Jean Ferré comme un patrimoine français que l’on doit défendre au même titre que la nation. On craint alors l’immigration de mots étrangers et le métissage culturel.
GENOCIDE : il est utilisé et circonstancié à trois occurrences: le massacre des Vendéens au cours de la guerre civile de 1792; l’extermination de 4 millions d’embryons par l’IVG; le massacre des Irakiens perpétré pendant la Guerre du Golf. Jamais il n’est utilisé lorsqu’il est question de la Shoah, le génocide juif.
HUMANITARISME : désigne cette idéologie des droits de l’homme qui autorise à ouvrir nos frontières et à assister financièrement ou médicalement les étrangers au détriment des français. C’est bien sûr le résultat d’un complot qui vise encore une fois à détruire l’identité française.
MONDIALISME : Ce terme est la version moderne du  » cosmopolitisme “, ou de ce qu’était  » l’Anti France  » sous Pétain.
OFFICINE : Chères à Jean Ferré, les officines sont de véritables agences secrètes de perversion et de propagande ayant pour objet la destabilisation de sa radio.
PAYS RéEL : Présente dans le jingle de la radio, cette notion marque l’appartenance à une vision bien spécifique de la nation : celle qui s’est manifestée lors de la Contre Révolution. Opposé en tout point au pays légal des jacobins, le pays réel fait référence à un système d’état où la légitimité du pouvoir provient de la nature des choses. On est plus élu, mais investi ; on ne gouverne pas, on dirige. L’ordre naturel prévaut sur l’ordre social.
RESISTANCE : Pour Jean Ferré, le président de la Radio,  » les seuls résistants  » qu’il connaisse se comptent parmi  » les hauts fonctionnaires de Vichy “. Par extension, la France doit aujourd’hui résister contre l’invasion des immigrés, le fiscalisme ou la pornographie; bref, de toutes les formes que prend aujourd’hui  » la décadence “. RC est bien sûr l’organe de cette résistance.
SIONISTE : adjectif qui supplante progressivement le mot  » juif  » (inutilisable) et le mot  » israélite  » (encore parfois utilisé) dans le vocabulaire de RC. Contrairement aux deux précédents, il offre l’avantage de créer un lien avec l’Etat d’Israël et donc une prétendue appartenance des juifs français à une  » puissance  » étrangère. Il permet donc de relativiser la valeur de la nationalité accordée aux juifs français.
QUELQUES DéRAPAGES.
16 OCTOBRE 1992.
“ Il y a des juifs qui ont souffert, il y a des catholiques qui ont souffert, il y a des laïcs qui ont souffert… Si on fait le total il y a beaucoup plus de non-juifs massacrés et morts en déportation que de juifs “, dixit Pierre de Villemarest, co-animateur du  » Libre Journal  » de Claude Giraud sur RC. Ancien de l’OAS, il est le chantre des théories conspirationnistes françaises et membre du comité de rédaction de la revue intégriste catholique  » monde et vie “.
20 NOVEMBRE 1996.
“Je pense qu’en France en 1943, on ne traitait pas les juifs comme on traite aujourd’hui les gens du FN. Évidemment on les arrêtait, on les déportait. En Allemagne il y a eu des choses, mais en France je n’ai pas souvenir qu’il y ait eu de pogroms comme on en fait actuellement aux gens du FN… », dixit Serge de Beketch, animateur du  » Libre Journal  » du mercredi sur RC. Ancien scénariste de  » Pilote “, raciste déclaré, il est rédacteur en chef d’une publication  » Le Libre Journal de la France Courtoise “, présente sur Minitel et sur Internet. Il fut chargé de la communication à la mairie FN de Toulon.
20 MARS 1997.
 » Je ne dis pas qu’il n’y a pas eu de chambres à gaz, je dis qu’il y a eu des essais de chambre à gaz… Je connais deux ou trois cas d’essais… j’ai des chiffres précis … qui démentent tous les chiffres qu’on a donné… “, dixit Pierre de Vilmarest (voir plus haut).
Tristan Mendès France
Michaël Prazan
L’événement du Jeudi 26 aout 97

Les fils du professeur Lejeune

Lorsque Jacques Chirac a reçu le Pape Jean-Paul II à l’Elysée, ce jeudi 21 août, nul n’a osé évoquer la visite privée que le souverain pontife avait prévue de faire le lendemain à son ami le défunt professeur Lejeune. Inutile de rappeler qui était le professeur Lejeune; ses découvertes sur la trisomie 21 mais aussi ses convictions contre l’avortement sont aujourd’hui connues de tous. Si le président n’avait sans doute aucune envie d’anticiper une polémique, rappelons cependant qu’il existe une association – qui a pris le statut de Fondation reconnue d’utilité publique par décret le 20 mars 1996 – entièrement consacrée à la mémoire de Jérôme Lejeune et qui a pour parrain officiel Jacques Chirac lui-même. Jean-Paul II, se recueillant à titre privé sur la tombe du professeur Lejeune, c’est peut-être une affaire d’amitié ou d’ingérence, peu importe, mais que le président de la République parraine une association ouvertement hostile à l’avortement – lui qui avait en son temps soutenu la loi Veil – a de quoi surprendre, même si ce parrainage n’était qu’un hommage rendu au généticien qui avait soigné sa fille alors en pleine dépression.
Cette  » Association des amis du professeur Lejeune  » est présidée par Jean Foyer, ancien garde des sceaux puis ministre de la Santé, également président des juristes pour le respect de la vie. Parmi les administrateurs fondateurs de l’association, la fille du professeur, Clara Lejeune (qui dirigea le cabinet de Colette Codaccioni) et son mari, Hervé Gaymard, par deux fois secrétaire d’Etat. Il est également l’ancien directeur de la communication de Jacques Chirac.
Personne ne souhaite bafouer la mémoire de Jérôme Lejeune, personne ne peut remettre en question sa contribution à la science ni même revenir sur ce que furent ses convictions personnelles. Il n’en reste pas moins que ces mêmes convictions sont à l’origine d’une multitude d’associations anti-avortement telles que « pour le respect de la vie », « Laissez-les vivre », « Les femmes et les enfants d’abord », « Secours aux futurs mères », ou « SOS tout-Petits », le commando intégriste de Xavier Dor qui voue un véritable culte au professeur Lejeune. Cette galaxie d’associations aux procédés bien peu catholiques sont toutes liées, de près ou de loin, à l’Eglise Saint Nicolas du Chardonnet, le fief de Monseigneur Lefebvre… autrefois répudié par Rome ! Cherchez l’erreur…
Bref, la mémoire du professeur est entre de bonnes mains. Et si l’on en doute encore, on peut se remémorer certains passages du discours que prononça Lucien Israël – le fils spirituel de Jérôme Lejeune – lorsqu’il reprit la chaire du généticien à l’honorable Académie des sciences Morales et politiques: « Il avait accepté et intériorisé dans sa plénitude la loi divine, l’avait placée au dessus de toute celles que se donne l’homme… Et pour lui , ainsi que pour tout croyant , la vie commence lors de la conception et n’admet qu’une fin naturelle […] C’est au nom de ses convictions intimes que Jérôme Lejeune s’est battu sans relâche contre l’avortement, contre l’euthanasie – cette autre revendication folle des biens portants hédonistes « . Lucien Israël est aussi professeur à la faculté de médecine et titulaire de la chaire de cancérologie de Paris XIII.
Jacques Chirac ayant soutenu la loi Veil se trouve dans une position délicate. Son appartenance à  » l’association [anti-IVG] des ami du professeur Lejeune  » ne va pas l’aider dans la polémique qui s’installe. Gageons qu’il ne fait que reprendre cette phrase extraite des Evangiles et qu’on a pu lire sur les affiches du métro parisien cette dernière semaine :  » aime ton ennemi « .

Tristan Mendès France
Michael Prazan
Libération 27/6/97